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Association autour du peintre Antoine Martinez

Antoine Martinez

Antoine Martinez vu par ses contemporains

"Martinez attribue toujours la première place aux valeurs. Dans ce clair-obscur dont il a le secret, il donne au sujet un relief saisissant. Il sait tirer du dépouillement du dessin et de l'unité des couleurs de surprenants effets de contraste. Ajoutez à cela ce reflet de gravité, voire de pathétique qui imprègne ses oeuvres et vous aurez là tout l'essentiel du talent d'Antoine Martinez."

Léon Rey
Portrait de Jean-Louis BORY
Portrait de Jean-Louis BORY
Vers 1949. Huile sur panneau. 100 x 81 cm

"Il volera de ses propres ailes vers 1938, substituant à la technique flamande, une technique italienne plus propice à l'expression de son tempérament, et des références ibériques à son amour premier du lyrisme charnel de Rubens, de ses pleines pâtes chaleureuses ; il tient déjà El Greco pour le plus sublime exemple, va chercher des bruns chez Zurbaran, des contrastes lumineux chez Caravage."

Jean-Louis Audin (1950)

"L’artiste s’efforce d’inclure, dans ses personnages éclairés par le dedans, un curieux pathétique."

R. Domergue (1950)

"L'une des meilleures toiles de Martinez est La Toupie, pleine de relief, d'équilibre et de grâce ; mais son Portrait de J.L. Bory, qui reflète bien ce qu'il y a de fringant et d'acide dans le Prix Goncourt 1946 est également une très bonne chose."

Jean-Louis Audin (1950)

"Tous ceux qui ont suivi Antoine Martinez dans sa marche ascendante vers le succès, peuvent aujourd'hui constater l'heureuse évolution d'un peintre qui demandait tout, dans les débuts de sa carrière, au brillant de la couleur et qui maintenant s'exprime par des moyens moins faciles et qui sont d'un véritable artiste : la justesse des valeurs. Plusieurs de ses toiles prouvent, d'ailleurs, avec quel succès il y parvient. Ne suffit-il pas de s'attarder devant ses rues, notamment celle de Draveil en Seine-et-Oise et celle de Mainville, pour admirer avec quel talent et quelle sûreté de métier le peintre joue sur un large clavier de gris, ce qui lui permet tant d'harmonies subtiles ! Mais d'autres œuvres sont aussi des témoins du beau talent de l'artiste. Qu'il s'agisse du solide portrait d'Emmanuel Robles (lauréat du prix Fémina) ou du jeune Diego (fils du peintre), de ses petites mauresques, de ses paysages ou de ses natures mortes, on est heureux de se trouver en présence d'une belle et riche matière et d'une personnalité bien affirmée."

Eugène Cruck (1950)
Mainville un jour d'orage
Mainville un jour d'orage
vers 1949. Huile sur panneau. 65 x 54 cm
Dans les roseaux.
Dans les roseaux.
1967. Huile sur panneau. 102 x 174 cm
Enfants jouant du fifre ou Les 2 pipeaux.
Enfants jouant du fifre ou Les 2 pipeaux.
Vers 1951. Huile sur toile. 65 x 81 cm

"Par son art rigoureux que qualifie une poésie inspirée du tragique quotidien, Antoine Martinez nous donne des oeuvres qui atteignent parfois au pathétique et comme telles, absolument émouvantes. Sa composition Le départ pour l'école où, toute insistante anecdotique comme toute recherche d'effets sont exclus, en témoigne. Mais il faudrait tout citer tant il y a là d'œuvres remarquables qui nous incitent à affirmer qu'Antoine Martinez est aujourd'hui en pleine possession de ses moyens."

Ernest René Collot - Le Figaro (1954)

"Sa peinture est large, orientée vers un réalisme parfois un peu théâtral mais de bonne qualité. La pâte est solide, la couleur rigoureusement juste dans sa transposition."

Jean Bouret - Arts

"Attiré par la peinture du Greco, de Georges Latour, de Manet, de Van Gogh, il ne pouvait avoir qu’un style très moderne qu’il définit nettement par ses tendances au néo-réalisme, à l’expression figurative. Il recherche les déformations expressives, les contrastes des valeurs. Il aime la peinture pure, la belle matière, le dépouillement dans l’ordre."

Claude Darcy

"Il faut avoir vu Antoine Martinez dans le feu de la création, dans l’éblouissement de l’émotion esthétique, pour être convaincu de la passion qui l’habitait. Il faut l’avoir vu dans l’établissement d’un équilibre de valeurs, dans la recherche méthodique et méticuleuse d’une harmonie de couleurs, pour être certain que cette passion s’accompagnait de lucidité et de maîtrise parfaite : deux éléments essentiels qui manifestaient l’authenticité de sa vocation et émerveillaient ceux qui l’approchaient ... Passionné et lucide, ému et maître de son émotion, inspiré et fort de sa technique, avec ce sentiment d’insatisfaction propre aux vrais artistes, tel fut Antoine Martinez ... Je voudrais terminer en évoquant une toile claire et lumineuse qui dans la suavité de son ciel, fait contraste avec beaucoup d'autres : un berger jouant de la flûte à travers les roseaux. Toute la toile est musique. Musicaux, les rapports des tons. Musicaux les lignes et le mouvement des feuilles, les intervalles séparant les tiges. Et la mélodie s'échappe de sa prison de roseaux."

Simone Bertrand (1970)

Dans “La Peste” comme dans “Le Minotaure” Albert Camus a décrit Oran avec beaucoup de verve et d’esprit en omettant toutefois d’en définir le caractère proprement ibérique. Depuis le XVI° siècle, en effet, où la ville fut conquise par le Cardinal Ximenes de Cisneros pour le compte de la Couronne d’Espagne, Oran n’a jamais perdu cette empreinte, visible encore aujourd’hui dans ses forteresses, ses arènes, ses portes armoriées, ses ruelles et ses maisons du quartier de la Marine. Et jusqu’à l’indépendance algérienne l’Espagne a toujours été présente par ses immigrants venus nombreux de la côte levantine, des Baléares, de Malaga, d’Alméria et de Séville.
Ainsi s’explique que certains écrivains et artistes nés à Oran (ou en Oranie, comme Jean Sénac, de mère espagnole) portent en eux toutes les fatalités d’une race qui, au long des siècles a essaimé à travers le monde. La personnalité comme le talent d’Antoine Martinez doivent s’expliquer par cette dualité où se fondent le tempérament ibérique et la sensibilité française. Cependant, et sans minimiser tout ce qu’il doit à notre culture, on devine dans son oeuvre son admiration pour les grands maîtres du siècle d’Or espagnol, une oeuvre qui porte aussi la marque évidente de ce “sentiment tragique de la vie” dont parle Unamuno.

Emmanuel Robles
Emmanuel Robles. Vers 1952. Huile sur toile. 116 x 88,5 cm

Antoine Martinez et moi avons fréquenté la même école primaire au centre d’Oran, une école qui s’était d’abord appelée Ecole Karguentah, du nom même du site, puis Jules-Renard, en l’honneur du célèbre auteur de “Poil de carotte”. Il s’agissait d’un établissement vétuste avec une courette ombragée de quatre ficus poussiéreux. Nous avons appartenu aux mêmes classes et le souvenir qui domine en moi est celui de son extraordinaire virtuosité pour le dessin. Il surprenait jusqu’à nos maîtres par la sûreté de son oeil et de sa main et à partir de treize ans on le vit assez détaché des autres disciplines comme s’il était, à la lettre, possédé, envoûté par ses propres dons, déjà porté à recréer sa vision du monde et de lui-même.
Adolescent, il avait déjà ce physique de torero qu’il a conservé le reste de sa vie, qui s’est accentué passée la trentaine, le corps sec, le visage long et brun, les yeux pleins de cette mélancolie des hommes de l’arène, habitués à regarder la mort noire, la muerte negra, surgir pour eux dans le soleil.

Plus tard, j’ai fréquenté son atelier de Draveil et je l’ai observé au travail avec cette expression grave, tendue et en même temps “éclairée” du bestiaire en face de son destin. Et de fait, la peinture pour Antoine Martinez n’était pas un jeu au sens où le définit Roger Gaillois mais un engagement de l’être, un engagement entier du coeur et de l’esprit qui peut faire comprendre son dédain pour les vanités mondaines, les intrigues, les concessions à la futilité des snobs et au mercantilisme. Certes, on lui a fait payer cher cet orgueil d’homme et cette dignité d’artiste et sans doute a-t-il souffert d’un certain silence mais il pouvait merveilleusement sourire lorsqu’il savait son oeuvre comprise, appréciée par les plus fervents, ceux qui connaissent la vertu de l’isolement, hors des modes, en marge des clans et des chapelles.

Je me souviens encore de ces heures dans l’atelier au milieu du jardin, à l’époque où il brossait mon portrait, je me souviens de nos conversations, de sa foi dans sa mission de créateur et de son besoin de solitude, de méditation, de rigueur. Au vrai, il avait une sensibilité d’écorché vif mêlée à une grande tendresse, une profonde pitié pour l’humanité souffrante, le tout couronné par cette générosité, cette fierté qu’en Espagne on appelle “hidalguia”. Tous ces traits sont inscrits, pour qui sait voir, dans ses toiles et dans ses dessins, à la fois comme un émouvant autoportrait et comme un chaleureux message que la mort elle-même n’a pu détruire.

Emmanuel Robles de l’Académie Goncourt (1971)

"Á travers cet art déchiré, qui exprime la volonté d'être profondément humain, une grande maîtrise s'affirme. Elle élève A. Martinez au rang des peintres les plus authentiques de notre époque. Par sa volonté tenace, son dédain du médiocre, son intelligence dans l'effort, l'artiste a su magnifier son talent et le défendre contre les petitesses de la vie et même contre les sursauts de son âme inquiète.
Son œuvre abondante et variée fut enfantée jour après jour dans la réflexion incessante et grâce à un labeur opiniâtre. Elle est le reflet fidèle du rayonnement de sa vie intérieure intense. On y retrouve ce mélange de gravité et d'ascétisme, venu de ses origines espagnoles, et cette passion d'ordre, de mesure, profondément française. Derrière son masque impassible d'hidalgo castillan, aux traits émaciés et au regard sombre, se dissimulait une âme ardente et passionnée, éprise de perfection."

Hermance Molina (1973)
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